Les investissements dans l’immobilier d’entreprise en chute libre
12 mars 2009 - 10 h 21 min - Immobilier d'entreprise - Pas de commentaireD’après Le monde, ce qui fait le caractère inédit de la crise actuelle est qu’elle touche toutes les régions du monde de façon quasi-simultanée. L’immobilier ne fait pas exception. Selon le cabinet de conseil Cushman & Wakefield, les capitaux investis dans l’immobilier d’entreprises, bureaux et commerces, ont globalement chuté dans le monde de 61 % par rapport à 2007. Les volumes d’investissement sont ainsi passés de 746,8 milliards d’euros à 287,6 milliards.
L’Amérique du Nord a été le premier marché affecté, et de la façon la plus dure, avec un écroulement de 73 % des investissements, soit plus que 82,7 milliards d’euros, en 2008. En Europe, la baisse atteint 55 %, le Royaume-Uni étant le plus touché. La crise entraîne une redistribution des cartes : la Chine devient l’une des zones les plus attractives de capitaux, après les Etats-Unis mais devant la Grande-Bretagne et le Japon. Les loyers des bureaux de Tokyo et Hongkong sont désormais plus chers que ceux de Londres.
Des pays qui se croyaient à l’abri de la tourmente immobilière, comme la Russie, le Brésil ou les Emirats, sont désormais touchés. « Les investisseurs transfrontaliers sont très en retrait », confie Olivier Girard, directeur de Cushman & Wakefield France.
De grands projets sont arrêtés, parfois en plein chantier, comme la spectaculaire tour résidentielle Chicago Spire, de l’architecte Santiago Calatrava, stoppée net à l’étape des fondations et laissant un trou béant. La Russian Tower, de Norman Foster, à Moscow City, nouveau quartier d’affaires de la capitale russe, est abandonnée. A Varsovie, l’architecte irakienne Zaha Hadid ne construira pas sa Lilian Tower, en forme de lys, faute de débouché commercial.
AMBITIONS REVUES À LA BAISSE
A la Défense, la tour Signal, conçue par Jean Nouvel, qui devait être financée par une filiale de la foncière espagnole Metrovacesa, ne verra sans doute jamais le jour. Foncière des régions a dû revoir à la baisse son projet sur l’ancienne tour Axa, rebaptisée CB 21, qui sera rénovée sans l’agrandissement initialement prévu. D’où une dépréciation de valeur de 128 millions d’euros qui a contribué aux pertes de cette foncière en 2008. La tour Shard of Glass, dans la City de Londres, a, elle, été sauvée in extremis de l’abandon par le fonds souverain Qatari Diar, et son chantier devrait bientôt débuter.
« Nous comptions sur les capitaux du Moyen-Orient pour prendre la place des fonds de pension, d’investissement ou opportunistes qui avaient animé le marché jusqu’ici, mais eux aussi sont handicapés par la crise et doivent faire preuve de prudence », explique Philippe Leigniel, président du bureau de conseil DTZ. Même Dubaï revoit à la baisse ses ambitions : 582 milliards de dollars de projets ont été gelés. Le promoteur Emaar a affiché une perte au quatrième trimestre 2008, et son concurrent Nakeehl, qui envisageait une tour d’un kilomètre de haut, a déclaré forfait. « Le marché est attaqué par le haut et par le bas : non seulement il n’y a plus de financement pour des projets dépassant 50 millions d’euros, mais la progression du chômage ralentit aussi la demande de locaux à louer et fait baisser les loyers », analyse Philippe Semidei, de King Sturge, cabinet de conseil immobilier. Courant 2008, les loyers ont, par exemple, baissé de 17 % dans le West End londonien, de 11 % à la City, et de 17,6 % à Moscou. « Beaucoup d’investisseurs cherchent à vendre des immeubles, mais les acheteurs sont très agressifs et réclament d’importantes remises », observe Olivier Girard. L’espagnol Metrovacesa, par exemple, a encore fait une bien mauvaise affaire en achetant, au printemps 2007, pour 1,09 milliard de livres, le siège londonien de la banque HSBC et vient de le lui revendre pour 840 millions de livres, soit une perte de 250 millions en dix-huit mois.
Source: le monde / Isabelle Rey-Lefebvre